mercredi 15 avril 2015

Collège : savoir débattre de la réforme

Réforme du collège : ne pas s’interdire d’en débattre

Les discussions sur la réforme des collèges battent leur plein actuellement dans les salles des profs. C’est normal et le débat doit avoir lieu car le principe de la réforme du collège repose sur une responsabilité plus grande donnée aux personnels. Mais ce n’est pas toujours facile pour les adhérents du SGEN-CFDT de faire entendre une voix sereine. Surtout que la réforme proposée par le ministère peut être assez alléchante, mais pêche pour l’instant dans ses dispositions pratiques. Certains propos violents, des accusations, parfois des jeux troubles d’organisations syndicales peuvent faire dégénérer la discussion. Ci-dessous quelques éléments objectifs qui peuvent aider à garder les pieds sur terre.
De multiples « infos » sont diffusées
Avant même les premières informations officielles, certaines organisations (essentiellement FO et le SNALC) ont diffusé des nouvelles alarmistes. Et le phénomène ne fait que s’amplifier depuis.
Deux raisons à cela.
D'une part, ces deux syndicats (la liste n’est pas limitative, mais ils sont actuellement le fer de lance de la « guerre » contre cette réforme) sont systématiquement opposés à tout changement. C’est leur fond de commerce électoral. C’est paradoxal, car contrairement au SGEN, tout en dénonçant continuellement la situation actuelle, en surfant sur les frustrations du quotidien des collègues, ils refusent toute proposition qui vise à changer la situation. Ils utilisent tous les « dangers » potentiels ou imaginaires pour faire peur (on a vu ces deux derniers week-end que cela fonctionne bien dans d’autres domaines !). Voir ici les remarques que l’on peut faire sur les attaques les plus grossières.
D’autre part, la réforme est dans une phase de discussion avec les organisations syndicales qui se termine actuellement. On a donc eu des éléments plutôt changeants voire contradictoires. Cette phase se termine cette semaine (officiellement le 10 avril) et nous aurons des éléments plus sûrs à partir de la consultation des personnels qui commencera le 8 avril.
Vous pouvez déjà tordre le cou à certaines affirmations avec ce Vrai/Faux.
Cette réforme va dans le bon sens, ce qui ne veut pas dire qu’elle est idéale. De nombreux problèmes subsistent.
Même en faisant la part des choses, il ne faut pas être naïf : comme dans toute réforme, il y a des côtés positifs et d’autres négatifs. L’important pour le SGEN est la balance des deux.
Dans l'état actuel des choses, ce qui été écrit il y a deux semaines ici et ici est toujours globalement valable.
Du côté positif, on trouve le Socle et les élèves qui sont mis au centre de l’organisation de l’enseignement. Cela introduit unesouplesse dans l’organisation de l’enseignement : programmes moins directifs, nouvelles pratiques pédagogiques pour favoriser l’implication des élèves (EPI), forte autonomie des équipes pour s’adapter aux besoins (au moins 20% du temps scolaire obligatoire en théorie). Cela renforce aussi de nouvelles compétences pour les élèves (numérique, compétences sociales) et la prise en compte de l’ambiance de travail de l’établissement.
Les intentions sont bonnes pour le SGEN-CFDT, mais la réalisation ne va toujours assez loin et surtout cette réforme souffre d’un manque de moyens financiers qui handicape fortement la réalisation.
S’il y a eu quelques avancées sur les langues, LV1 et LV2, c’est à moyens constants : les heures récupérées sont prises ailleurs. Et un gros point noir : cette réforme introduit de nombreuses décisions à prendre par les équipes sans donner de temps pour la concertation. C’est un écueil majeur contre lequel le SGEN-CFDT se mobilise actuellement.
L’organisation des EPI est aussi source de questionnement et d’inquiétudes. A l’origine pris sur les enseignements disciplinaires (comme les IDD), ils leurs ont été en fait superposés. Cela permet de ne pas être inquiété sur la pérennité des postes. Les textes donnent actuellement une très grande latitude locale sur l’organisation de ces EPI (dans les disciplines, dans le temps), tout en leur donnant suffisamment de cadres obligatoires pour qu’ils soient effectivement mis en place. Les équipes qui s’en saisiront pourront sans doute en faire des choses très intéressantes … à condition cependant que les problèmes de programme, d’emploi du temps ou d’organisation de l’établissement ne passent pas en premier ! Car dans ce dernier cas, les EPI risquent juste de devenir une « corvée » institutionnelle comme ont pu parfois être vécus les IDD.
L’Accompagnement personnalisé (AP) reste lui aussi relativement vague dans son organisation. Comme il est inclus dans les enseignements disciplinaires, il va de fait se trouver limité aux « grosses » disciplines et mis en concurrence avec la réalisation des programmes (qui seront allégés mais cela reste à faire et à vérifier).
La volonté du ministère semble être de ne pas agiter de chiffon rouge en étant trop révolutionnaire et il a tenu compte des diverses interventions et pressions qui ont pu être faites. C’est sans doute nécessaire si on veut que les collègues s’approprient l’esprit de cette réforme, mais le risque qu’en fait rien ne bouge vraiment est réel. Et cela se ferait finalement aux dépens des élèves et des personnels.
Une réforme, même bonne, n’est jamais facile à mettre en place
Des changements, même dans l’idéal, ont parfois des conséquences plus que désagréables pour des collègues. Le rôle d’un syndicat est de défendre ceux qui verront leur situation se dégrader comme il est de défendre ceux dont la situation n’est actuellement pas favorable (qu’il ne faut pas non plus oublier). Il faudra donc obtenir des compensations et la prise de mesures particulières par l’administration. La disparition programmée de la plupart des classes bilangues, qui semble décidée, impactera les collègues d’Allemand par exemple. Le ministère et le rectorat devront donc leur proposer des perspectives autres que des postes partagés systématiques.
Le changement annoncé est important. Et il est souvent difficile de voir comment les choses vont se « goupiller » dans les faits quand on n’en a pas la pratique. Le ministère part du principe qu’il s’inspire des expériences qui ont réussi. Cela peut donner une certaine assurance mais il est bien évident que la généralisation va donner quelques surprises. Le SGEN-CFDT a aussi fortement insisté sur la formation nécessaire des personnels durant l’année 2015-2016, et le ministère semble nous entendre sur ce point.

Si Le SGEN peut soutenir certains éléments de cette réforme, il garde une vision critique (voir plus haut). Si le ministère a pu s’inspirer de nos propositions, il les a passées à la moulinette d’autres intervenants et aussi des contraintes budgétaires. Maintenant entre les deux options syndicales possibles (rejeter tout en bloc dès qu’un effet négatif apparaît ; juger globalement les choses et essayer de corriger ou atténuer les effets négatifs si les changements proposés sont plutôt positifs), le SGEN-CFDT choisit clairement la seconde. Ce qui est proposé est loin d’être parfait et pose donc de nombreux problèmes. Il est cependant aussi difficile de se dire « attendons autre chose » car il risque alors clairement de ne rien se passer encore une fois.

A+
Olivier Buon

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